Le compte personnel de formation va changer !
Orthogramm, organisme de formation en orthographe et en grammaire, vous alerte de plusieurs changements importants dans la formation professionnelle.
Un article du Monde daté du 22/01, des journalistes Bertrand Bissuel et Jean-Baptiste Chastand, nous explique :
Ce que le compte personnel de formation va changer pour vous.
Un petit bouleversement se prépare pour tous les actifs en matière de formation professionnelle. D’ici le 1er janvier 2015, l’actuel droit individuel à la formation (DIF) va se transformer en compte personnel de formation (CPF). Cette réforme, présentée en conseil des ministres mercredi 22 janvier, va octroyer de nouveaux droits aux salariés et aux chômeurs. Mais sans, pour autant, révolutionner le système.
Ce qui change.
Transférable. Le CPF a été créé par la loi du 14 juin 2013 (qui, elle-même, transpose un accord national interprofessionnel signé en janvier de la même année), mais son contenu n’avait pas été précisé. C’est désormais chose faite avec le projet de loi présenté mercredi, dont le volet formation professionnelle résulte d’un autre accord conclu le 14 décembre 2013 par les partenaires sociaux. Le CPF introduit un changement majeur : il sera ouvert à tous les actifs (salariés et chômeurs), quel que soit leur statut, et les accompagnera durant toute leur carrière professionnelle. Contrairement au DIF, les droits acquis chez un employeur seront transférables chez un autre employeur, et conservés lors des périodes de chômage.
« C’est tout à fait novateur », se réjouit Dominique Jeuffrault (CFE-CGC), qui a participé aux négociations sur l’accord du 14 décembre 2013. Le CPF constitue un « pas en avant » car il permet de « dépasser la segmentation par statuts (salariés, jeunes, demandeurs d’emplois…) », souligne Alberto Lopez, directeur du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Cereq). D’après lui, une telle approche peut favoriser l’accès à la formation pour les personnes « qui en ont le plus besoin » : salariés les moins qualifiés ou employés dans des TPE, demandeurs d’emplois, travailleurs employés dans des entreprises en difficultés, etc.
Plus généreux. Avec le CPF, les salariés pourront accumuler jusqu’à 150 heures de formation en neuf ans, contre seulement 120 heures pour le DIF (20 heures par an pendant les six premières années, puis 10 heures par an les trois suivantes). Ce crédit d’heures « est insuffisant pour bénéficier d’une formation qualifiante », relève M. Lopez. Mais le législateur, poursuit-il, en avait conscience et a d’ailleurs prévu un mécanisme permettant d’aller au-delà des 150 heures.
Le CPF s’apparente « à une besace qui pourra être abondée par un certain nombre d’acteurs (État, employeurs, Pôle emploi, etc.) », explique Danielle Kaisergruber, présidente du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie. « Par exemple, précise-t-elle, vous avez acquis 80 heures de formation et vous devenez chômeurs. Vous pouvez alors les faire valoir et abonder afin de suivre une formation qui peut permettre de changer de métier. Ce sera très utile aussi pour les jeunes qui sont sortis du système scolaire sans formation. Ils pourront utiliser leur compte pour se faire financer une formation par le conseil régional. » Par ailleurs, les salariés pourront utiliser leurs heures de formation sans être tenus d’obtenir l’accord de l’employeur si c’est en dehors de leur temps de travail. Ces formations seront financées par une cotisation des entreprises comprise entre 0,55% et 1% de leur masse salariale, selon leur taille.
Une information plus claire. Les actifs devraient avoir accès à un « système d’information » géré par la Caisse des dépôts et consignations, qui leur permettra de connaître « le nombre d’heures créditées et les formations éligibles ». Ces renseignements devraient être accessibles par Internet et les aider un peu à se retrouver dans un système ultra-complexe. Mme Jeuffrault affirme que son syndicat, la CFE-CGC, veillera à diffuser des informations sur ce nouveau dispositif pour que les salariés le connaissent et se l’approprient. Des campagnes d’affichage pourraient par exemple être organisées dans les entreprises.
Ce qui ne change pas.
Une organisation complexe. L’accord du 14 décembre 2013, s’il prévoit une meilleur transparence autour du CPF, ne bouleverse pas l’organisation de la formation professionnelle. Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), qui recueillent les cotisations par branche et financent les formations, restent au cœur du système. Les salariés devront encore s’adresser directement à eux lorsqu’ils souhaitent financer une formation. Sans compter qu’il leur faudra ensuite se tourner vers les régions ou Pôle emploi, par exemple, pour compléter le nombre d’heures de formation si celui-ci ne suffit pas.
« Les individus resteront les organisateurs de leur parcours, on n’est pas encore sur la voie de la simplification, estime Mme Kaisergruber. Pour y parvenir, il faudrait que les échanges entre les différents acteurs deviennent automatiques et plus fluides entre eux, mais cela prendra du temps. » « Je ne vois rien qui améliore la transparence du marché de la formation », renchérit Marc Ferracci, économiste spécialiste de la formation professionnelle, qui plaide notamment pour que les OPCA puissent certifier de la qualité des formations, afin de réduire le nombre d’organismes, très élevé en France et parmi lesquels les salariés ont parfois du mal à se repérer.
Par ailleurs, « le CPF ne fait rien pour lutter contre les inégalités », estime M. Ferracci : « Qu’on soit cadre ou smicard, on accumulera autant d’heures de formation, alors qu’elles sont beaucoup plus chères pour les cadres. Il aurait fallu donner davantage de droits aux personnes les moins qualifiées », plaide-t-il. Le système risque donc de continuer à bénéficier d’abord aux salariés déjà les mieux formés.
Le CIF va subsister. Si le CPF prend la place du DIF, le congé individuel formation (CIF) est maintenu. Permettant des formations plus longues, il devrait rester le principal véhicule pour changer de carrière. « Pour aller vers un autre métier, il faut en effet plutôt 500 heures de formation. Or le CPF est limité à 150 heures. », rappelle Mme Kaisergruber, qui pointe « qu’à long terme, la logique voudrait que le CIF évolue », et soit intégré dans le CPF. Ce projet de loi offre des « perspectives intéressantes » mais il y a encore des « inconnues » sur sa mise en œuvre, conclut M. Lopez. La réussite du CPF dépendra en particulier de l’implication des branches professionnelles, des régions et des entreprises.